Quelque part en Afrique, un ouvrier a été tué sur le chantier d’une entreprise européenne. Alboury, son frère, s’introduit « mystérieusement dans la cité » où vivent les Blancs pour réclamer son corps auprès de Horn, le chef du chantier. Ce dernier ne peut le lui rendre. L’ouvrier a été tué par Cal, son ingénieur. Une jeune femme, Léone, débarque pour la première fois en Afrique. Elle travaillait dans un hôtel de Pigalle et vient épouser Horn. Tandis que Cal tourne autour d’elle, elle rencontre Alboury. Quatre personnages se retrouvent ainsi réunis au cours d’une nuit de violence, d’amour et de désir.
La seule action dans cette pièce est la parole et ce qu’elle révèle. Koltès disait : « cette pièce ne parle pas de l’Afrique, car je ne suis pas un auteur africain. » Elle parle en effet d’une Europe vue comme un microcosme fermé et confronté à l’inconnu, au mystère, au sacré. Le « Combat de nègre » d’Alboury, qui porte le nom d’un roi, est celui de réclamer le corps de son frère qu’on a fait disparaître dans un égout. Il a à la fois une valeur mythologique et un sens actuel. Son entêtement, son opiniâtreté, sa résistance révèlent les contradictions des « chiens », leurs fantasmes, leur ignorance et leur mépris.
Il y a dans cette volonté farouche de cacher la vérité, du désarroi sincère. Il y a dans cette dissimulation des peurs et des inquiétudes, du radotage et de la mise en scène de soi qui prêtent à rire. Il y a dans cette recherche à faire payer à l’autre le prix de sa solitude, de la cruauté et de la drôlerie. Il y a enfin et surtout dans cette recherche vaine d’une conscience de l’autre, l’aveu d’une défaite, des routes qui ne mènent nulle part et un monde où tout reste à construire.